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RTE condamné à indemniser un éleveur
jeudi 8 janvier 2015, par
Dépêche AFP, 8 janvier 2015 :
Lignes à très haute tension : rare victoire d’un agriculteur contre RTE
La société RTE, filiale d’EDF, a été condamnée à indemniser un agriculteur bas-normand dont les vaches élevées près d’une ligne à très haute tension (THT) étaient malades, a-t-on appris jeudi, une décision rare.
"Le préjudice subi par l’EARL Charuel du fait du passage de la ligne à proximité et de l’impossibilité de poursuivre l’exploitation dans de bonnes conditions doit être indemnisée", a écrit le juge de l’expropriation dans le jugement daté de lundi dont l’AFP a eu une copie.
La société qui gère le réseau électrique français devra verser 142.000 euros à cet agriculteur, basé à Isigny-le-Buat (Manche). La ligne se trouvait à 60 mètres de l’exploitation.
"C’est unique en France" depuis une condamnation similaire en 2009 par le juge de l’expropriation de Tulle, dont la Cour de Cassation a, en 2011, confirmé l’annulation en appel, a déclaré l’avocat de l’agriculteur, Me Gervais Marie-Doutressoulle.
L’avocat estime, dans le cas de l’EARL Charuel, avoir fourni beaucoup plus de preuves que dans le dossier jugé à Tulle.
Interrogée par l’AFP, RTE a indiqué que la décision ne lui avait pas encore été notifiée.
En octobre, le juge de Caen a en revanche donné raison à RTE dans un dossier similaire. L’éleveur concerné, basé à Planquery (Calvados), a fait appel.
La construction, jusqu’à sa mise en service en 2013 d’une nouvelle ligne THT dite Cotentin Maine, avait relancé le débat sur l’impact des lignes à très haute tension.
Cette ligne de 163 km, la plus longue construite en France depuis plus de 20 ans, avait fait l’objet de multiples recours, notamment de la part d’agriculteurs.
Les communes de Planquery et d’Isigny-le-Buat ne sont toutefois pas concernées par cette ligne THT mais par d’autres.
Dans ces dossiers, la question est toujours de savoir si les maladies des vaches sont dues aux champs électromagnétiques de la ligne ou à un problème dans l’exploitation.
Agence France Presse 2015
Article Ouest-France 8 janvier 2015 :
THT : RTE condamné à indemniser un éleveur
Lundi, le juge de l’expropriation de Coutances a condamné le gestionnaire du réseau français de transport d’électricité (RTE) à verser 142 010 € à un couple d’exploitants laitiers du Sud-Manche.
Thierry et Marie-Annick Charuel, éleveurs bovins du Sud-Manche, estimaient que la ligne Très haute tension (THT) rendait leurs vaches malades. Ce couple d’Isigny-le-Buat, près d’Avranches, a obtenu gain de cause contre RTE. Le tribunal de Coutances a condamné le gestionnaire du réseau français de transport d’électricité, à verser 142 010 € à ces exploitants, installés à moins de 100 m de l’ancienne ligne THT.
Au vu des études techniques et vétérinaires, le juge de l’expropriation a estimé que « les dommages occasionnés dans le fonctionnement de l’exploitation résultent directement de la proximité de la ligne très haute tension de 400 000 volts ». Il a retenu le préjudice de perte d’exploitation au couple, aujourd’hui reconverti dans les céréales après la vente de son cheptel en 2012.
Mammites, problèmes de reproduction et de fertilité, taux de cellules élevés... Quand Thierry Charuel a repris la ferme de ses parents en 2000, les problèmes sanitaires dans son troupeau d’une soixantaine de vaches existaient déjà. A l’époque, ceux-ci suspectaient leur propre installation électrique qui n’était plus aux normes.
Des demandes restées lettre morte
En 2004, le jeune exploitant décide d’agrandir son bâtiment d’élevage et de le doter d’un robot de traite automatique. Il fait alors appel à RTE pour savoir si ces travaux sont compatibles avec la ligne THT. La filiale d’EDF donne son aval, émettant des recommandations en matière d’installations électriques et d’isolation. Ces préconisations sont suivies à la lettre et la société paye la facture.
Les dysfonctionnements dans l’étable persistent. En 2008, un protocole GPSE (Groupe permanent de sécurité électrique) avec des expertises indépendantes est alors mis en place. RTE indemnise les manques à gagner de l’exploitant jusqu’en 2011. Les symptômes persistent encore. Jusqu’au mois d’août 2012. Pendant un mois, l’éleveur constate une nette amélioration. Au moment même où le courant est coupé pour permettre de construire la nouvelle ligne Cotentin-Maine. Les anomalies reviennent en même temps que l’électricité dans les pylônes. Les nouvelles demandes de réparations financières du couple sont restées lettre morte. Le tribunal en a décidé autrement.
L’avocat caennais des plaignants, Me Marie-Doutressoulle, se félicite de cette victoire : « C’est le premier jugement qui reconnaît le lien direct entre les difficultés d’exploitation d’un éleveur et la propagation des courants vagabonds dans le sol, provenant des lignes THT et des pylônes. »
La bataille judiciaire n’est sans doute pas terminée. Contactée mardi, la direction de RTE a indiqué « étudier toutes les voies de recours possibles ». Et relativise cette condamnation : « C’est une affaire de dommages classique. Avec la ligne Cotentin-Maine, des tas d’agriculteurs ont argué des désordres liés à la ligne THT et demandent des indemnités. Ces affaires ne prospèrent pas car le lien de causalité n’est pas prouvé. »
Sarah CAILLAUD, Ouest-France