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Les lignes à très haute tension en accusation - Article L’Express
jeudi 14 janvier 2010, par
Le préfet de la Manche est accusé de violer le principe de précaution à propos de la future ligne très haute tension Maine-Cotentin, dont il refuserait d’évaluer les risques sanitaires. Décision du tribunal aujourd’hui.
Photo AFP
Décision sous haute tension, aujourd’hui, à Coutances (Manche). Le tribunal de grande instance examine la requête de 17 communes et 31 associations qui ont assigné en référé Jean-Pierre Laflaquière, préfet de la Manche. Elles l’accusent de violer le principe de précaution, en refusant d’évaluer les riques sanitaires liés à la ligne très haute tension (THT) qui doit relier le nouveau réacteur nucléaire EPR de Flamanville au réseau électrique. Le danger des champs magnétiques n’a jamais été prouvé, mais de nombreux riverains se plaignent des conséquences des lignes THT sur leur santé ou celle de leur élevage (lien).
Le préfet, quant à lui, cherche à obtenir du Président du TGI de Coutances qu’il se déclare incompétent à juger l’affaire. "Il met la balle en touche pour gagner du temps", juge Maitre Gervais Marie-Doutressoulle, avocat des maires anti-THT. Longue de 160 km, la ligne doit entrer en service en 2013. Pour ses opposants, la course contre la montre est lancée.
Avis favorable de la commission d’enquête
Mi-décembre 2009, la commission d’enquête publique a en effet rendu un avis favorable au projet, assorti toutefois de quelques réserves, notamment sur l’enfouissement de la ligne (lien). Désormais, le ministre de l’Ecologie et de l’Energie, Jean-Louis Borloo, peut donc signer à tout instant la déclaration d’utilité publique, ouvrant ainsi la voie à la mise en oeuvre de la ligne Cotentin-Maine.
Pourtant, depuis 2006, les 17 communes et 31 associations demandent la mise en place d’une enquête épidémiologique permettant de connaître les risques liés aux champs magnétiques. Une enquête que le préfet de la Manche refuse toujours de lancer. En août dernier, ils avaient déjà assigné en référé le haut fonctionnaire, lui reprochant de ne pas mettre en oeuvre le principe de précaution. Inscrit dans la Constitution depuis 2005, il oblige les autorités publiques à réaliser des procédures d’évaluation des risques lorsque plane une menace "grave et irréversible sur l’environnement".
Pas de réponse aux lettres des élus
"En août, le tribunal a jugé que la voie de fait n’était pas constituée puisqu’il était toujours possible de mener une étude épidémiologique, reprend Maitre Gervais Marie-Doutressoulle. Nous avons donc interprêté cela comme une invitation tacite et implicite à mettre en oeuvre cette étude." Mais depuis, toujours rien. Le préfet ne répond pas aux lettres des élus locaux. "Nous en tirons les conséquences", explique l’avocat de ces maires qui ont donc, une nouvelle fois, assigné en référé Jean-Pierre Laflaquière.
Le principe de précaution a récemment été invoqué par la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, à qui l’on reprochait d’avoir acheté 94 millions de vaccins contre le virus de la grippe A (H1N1). Pour l’application de cet article constitutionnel, il semble que le lobby pharmaceutique ait eu plus de poids que les milliers de riverains d’une ligne à très haute tension...
Article L’Express
Par Sylvain Morvan, publié le 14/01/2010 à 08:00