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La ligne 400 000 volts électrise la contestation - Articles Ouest-France
samedi 31 janvier 2009, par
Article ouest-france du 31 janvier 2009
Les opposants à la future ligne très haute tension Cotentin-Maine manifestent aujourd’hui dans la Manche. Trente-cinq maires refusent qu’elle passe chez eux, au nom du principe de précaution.
En France, 360 000 personnes vivent à proximité d’une ligne « très haute tension » (THT). Certains habitants du Sud-Manche n’ont pas envie de faire partie du lot. Dans le bourg du Chefresne, une affiche invite à la manif « contre la THT, samedi à Mortain ». Un bus partira au petit matin. « Il est déjà plein », assure Jean-Claude Bossard, le maire.
Le village de 300 âmes est à la pointe de la contestation. Selon le tracé de RTE (Réseau de transport électrique), la deuxième ligne THT doit traverser la commune par l’est. « Nous avons été le premier conseil municipal à prendre une délibération contre la construction de l’EPR à Flamanville, souligne l’édile. Nous avons pris un autre arrêté interdisant le passage de la ligne. » Contrairement à ceux d’autres maires de la Manche, d’Ille-et-Vilaine et de Mayenne, « le nôtre n’a pas été cassé par la justice ». Préfecture et RTE ont laissé passer le délai de recours. « Il reste donc applicable. »
« Pas des anti-tout »
Si trente-cinq des soixante-quatre communes concernées refusent la construction de la ligne THT, « c’est pour la protection de la santé de nos concitoyens et des animaux », défend Gérard Lacroix, président de l’association « Pas de THT sous les pommiers », de Cerisy-la-Salle (Manche).
« Nous en appelons au principe de précaution, réclame Jean-Claude Bossard. Nous savons, après l’enquête menée auprès des riverains de la ligne existante (lire ci-dessous), que ces lignes sont nuisibles pour leur environnement. »
Au Chefresne, on se défend toutefois d’être « des anti-tout ». « Nous réclamons simplement l’application de la Charte de l’environnement, adossée à la Constitution : chacun est en droit de vivre dans un environnement sain », plaide le maire normand. Il est convaincu « que tout peut être encore arrêté ».
La machine d’État, elle, poursuit son chemin. Avant même l’ouverture de l’enquête d’utilité publique (sans doute au début du mois de mai), le préfet de la Manche a mis en branle la commission d’indemnisations. Elle négocie avec les communes. Enfin, celles avec lesquelles le courant passe plus facilement.
Jean-Pierre BUISSON.
Autre article ouest-france du 31 janvier 2009
Seules les nuisances visuelles seront indemnisées
Repères
Une ligne THT, pour quoi faire ?
En 2006, EDF a décidé de construire un troisième réacteur nucléaire à Flamanville, de type EPR. Mise en service prévue en 2012. La puissance totale du site passera alors de 2 600 à 4 200 mégawatts. Les lignes existantes ne suffiront pas à drainer ce surcroît d’électricité : EDF a donc demandé à sa filiale RTE d’étudier la construction d’une nouvelle ligne THT.
Pourquoi ne pas enterrer les lignes ?
La nouvelle ligne à 400 000 volts devra rejoindre la ligne THT existante entre Rennes et Le Mans. Le tracé dit « de moindre impact » couvre 163 km. RTE espère entamer les travaux en 2010. Coût : 200 millions d’euros (340 avec les mesures compensatoires).
L’hypothèse d’enterrer la ligne est écartée. « Impossible », affirme Jean-Marc Perrin, directeur du projet Cotentin-Maine. C’est techniquement compliqué (Il faut un tunnel ventilé de 2 m de large sur 2 m de haut), cher (jusqu’à un million d’euros du kilomètre), avec un impact environnemental non négligeable.
Le préjudice esthétique est-il pris en compte ?
C’est le seul préjudice que reconnaît RTE. Les dix-huit câbles de la ligne seront portés par des pylônes de 50 m de haut, un tous les 500 m. Jean-Marc Perrin (RTE) prévoit qu’une cinquantaine d’habitations se trouveront à moins de 100 m de la ligne.
Mais quiconque estimera subir un préjudice visuel pourra saisir une commission spécialement créée. « Elle évaluera le montant du préjudice et nous paierons. Les gens pourront aussi vendre leur maison : nous verserons la différence entre le prix de vente et le prix estimé avant la construction de la ligne. »
RTE admet aussi que des courants parasites peuvent avoir un effet nocif sur des élevages voisins. Dans ce cas, l’entreprise enverra ses électriciens vérifier la mise à la terre des bâtiments.
Des effets sur la santé ?
Les experts sont embarrassés. D’un côté, aucune étude n’a montré de lien de causalité direct entre proximité d’une ligne THT et problèmes de santé. De l’autre, les riverains se plaignent parfois de stress ou d’état dépressif.
2800 Normands ont été sondés par le Criirem (Centre de recherche sur les rayonnements électromagnétiques) : l’enquête a conclu que « les conditions de vie près des lignes THT sont significativement détériorées ». Récemment, à Tulle, des agriculteurs qui déploraient des nuisances sur leurs animaux ont obtenu la condamnation de RTE.
Le gestionnaire du réseau électrique fait appel et conteste l’enquête Criirem : « Les recherches scientifiques menées depuis trente ans n’ont jamais révélé d’effet sur la santé », observeJean-Marc Perrin. Expert auprès de la Commission européenne, le Dr Laurent Bontoux évoque un possible « effet nocebo » (pathologie causée par « la croyance que quelque chose est nocif »).
Serge POIROT et J.-P. B.
Débat THT. Contre : « Nous nous battons aussi pour les personnes qui ...
Autre article Ouest-France - 30 janvier 2009
Jean-Claude Bossard, maire du Chefresne, dans la Manche.
« Nous nous battons aussi pour les personnes qui vivent à proximité d’une 400 000 V. Pour nous, il s’agit avant tout de préserver la santé de nos concitoyens et des animaux. L’enquête menée récemment dans la Manche auprès des riverains de la ligne existante entre le Cotentin et la Bretagne confirme que ces lignes créent des nuisances pour leur environnement. Nous recevons de plus en plus de témoignages d’agriculteurs qui n’osaient pas se manifester jusqu’à présent ou qui n’avaient pas été entendus par leurs instances.
Quand on voit l’argent dont dispose RTE pour faire passer la pilule auprès des communes, on s’étonne que ces sommes ne soient pas utilisées pour une étude épidémiologique. Nous réclamons que des mesures de précaution soient prises et qu’une telle ligne ne puisse être construite à moins de 500 m d’une habitation et 300 m d’une installation agricole. Notre combat contre cette ligne vise aussi à poser les questions sur la production d’énergie. Il faut en terminer avec la centralisation de la production, comme c’est le cas avec le nucléaire.
Nous devons travailler à multiplier, non seulement les sources d’énergie, mais aussi le maillage de la production. Si on développe le solaire individuel et collectif, on répond en partie à cette préoccupation. Nous soutenons les économies d’énergie, pas la surproduction. »