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La Manche Libre : "Prend-on les Normands pour des idiots ?"
mardi 23 septembre 2008, par
Chez les opposants au projet de ligne aérienne THT, la bataille s’est déplacée sur le terrain de la santé.
Patrick et Corinne Harel ont la malchance de voir passer la première ligne THT de 400 000 volts à quelques dizaines de mètres de chez eux. Et sont menacés par le passage de la ligne Cotentin-Maine...
Maître d’ouvrage du projet de ligne électrique (THT) de 400 000 volts lié au futur EPR de Flamanville, RTE, filiale d’EDF, arrivera-t-il à respecter la date de fin 2011 fixée pour la mise en service de cette ligne ? Cette question se pose avec acuité, alors que le début de l’enquête publique, initialement prévu en septembre, pourrait être reporté à nouveau de trois mois.
Nathalie Kosciusko-Morizet se déplace
Le retard devrait en outre s’accroître à cause de la « concertation approfondie » avec toutes les parties concernées exigée par Jean-Louis Borloo, ministre de l’Ecologie. Ce scénario est d’ailleurs envisagé par Philippe Bas, conseiller général (UMP) de Saint-Pois et vice-président du conseil général de la Manche, pour qui le projet doit être suspendu durant cette concertation. En attendant, la secrétaire d’État à l’Écologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, viendra dans la Manche à la fin septembre pour rencontrer, comme annoncé en juillet dernier, les élus dont les communes sont directement visées par le passage éventuel de la ligne.
Rassurer habitants et élus
La ministre répond ainsi à la demande du « Collectif des élus concernés par le projet THT Cotentin-Maine », dont le coordinateur est le maire du Chefresne, Jean-Claude Bossard. Dans un courrier adressé à la Secrétaire d’État, celui-ci souligne que « plus de la moitié des 64 communes du Calvados, de la Manche, de la Mayenne et de l’Ille-et-Vilaine impactées par le projet de ligne THT ont vu leur maires prendre un arrêté ».
But de cette mesure : imposer, au nom de la protection de la santé des hommes et des animaux, une distance minimum entre la ligne THT et les bâtiments d’élevage et d’habitation. Ces élus se réclament de la Charte de l’environnement, adossée à la Constitution, pour demander à Nathalie Kosciusko-Morizet que RTE abandonne son action devant le tribunal administratif de Caen visant à faire annuler les arrêtés pris par douze des communes du Collectif.
En se plaçant ainsi sur lePatrick et Corinne Harel ont la malchance de voir passer la première ligne THT de 400 000 volts à quelques dizaines de mètres de chez eux. Et sont menacés par le passage de la ligne Cotentin-Maine... terrain de la santé, le collectif rejoint en apparence les préoccupations de Jean-Louis Borloo et de sa secrétaire d’État qui, au début de l’été dernier, ont demandé à RTE d’insister fortement sur cette question dans le dossier qu’il constitue en vue de l’enquête publique. Car dans ce domaine, méprisant tout bonnement les habitants concernés, RTE n’a fait que renforcer les craintes.
Qu’on en juge : une habitante d’Hauteville-la-Guichard, Corinne Harel, et son époux Patrick, agriculteur dans cette commune, sont riverains de la ligne THT déjà existante et menacés de voir la seconde passer aussi tout à côté de chez eux. Inquiets des effets possibles de ce voisinage sur leur santé, il leur a été répondu par un représentant de RTE venu sur place présenter le projet : « il n’y a pas de danger ! Moi, je ne prends pas mes informations dans Marie-Claire ou dans Santé-Magazine ».
Voilà pourquoi le Collectif veut que « l’État commandite une étude indépendante prouvant le non impact d’une ligne THT 400 000 volts sur la santé de nos habitants et animaux ». Un point de vue partagé par Philippe Bas qui, au passage, n’hésite pas à faire monter les enchères : « cela ne manquerait pas de panache de la part de RTE s’il finançait lui-même un tel travail, confié à des experts à la fois incontestables et indépendants. Là encore, si ces demandes étaient acceptées, le projet prendrait du retard. Dans ces conditions, la solution de l’enfouissement de la ligne n’en apparaît que plus intéressante parce qu’elle ne soulève pas de telles questions de santé, avec tout l’intérêt économique que cela représente.
Fabrice Constensoux, La Manche Libre, 22 septembre 2008
Repères
Philippe Bas, ancien ministre de la santé : « Je demande une expertise indépendante »Colloque sur la santé
La coordination interrégionale « STOP-THT » organise à Laval, le samedi 25 octobre, un colloque international sur les effets des champs électromagnétiques sur la santé.
2 x 400 000 volts
Philippe Bas rappelle, à propos de la construction d’une seule ligne THT regroupant l’actuelle et la future, qu’en 2005, RTE a signé avec l’État une charte qui l’engage dans un tel cas de figure à privilégier les fuseaux existants.
Précédent juridique
Le 8 octobre 2004, le tribunal administratif de Pau a donné raison à une association opposée à la construction d’une ligne à haute tension. L’arrêté préfectoral d’utilité publique a été annulé car l’étude des effets de cette ligne sur la santé a été estimée insuffisante.
La Manche libre, le 20/09/2008